A propos de la réintégration des alsaciens-lorrains
Question écrite n° 02911 de M. Roger Husson (Moselle – RPR)
publiée dans le JO Sénat du 25/09/1997 – page 2516
M. Roger Husson indique à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice, qu’à une époque où l’Europe se construit et que le Gouvernement envisage de revoir le code de la nationalité et les conditions d’entrée des étrangers en France, les alsaciens-mosellans sont toujours soumis à la démarche vexatoire du certificat de réintégration. Rappelons que l’Alsace et la Moselle sont redevenues françaises en 1918, soit bientôt quatre-vingts ans. Chacun, à l’époque, a été contraint de faire une demande de réintégration à la France pour être français, ce qui était normal. En revanche, en 1997, il arrive fréquemment à l’occasion de démarches que le certificat de réintégration de nos grands-parents soit réclamé par l’administration .
Ne peut-on pas envisager, enfin, de mettre un terme à cette situation désormais scandaleuse et vexatoire pour les citoyens de nos 3 départements ?
Réponse du ministère Justice
publiée dans le JO Sénat du 27/11/1997 – page 3323
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l’honorable parlementaire que les traités de Francfort du 10 mai 1871 et de Versailles du 28 juin 1919 imposent de prendre en compte le statut de territoire étranger des actuels départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, entre le 20 mai 1871 et le 11 novembre 1918. C’est dans ce contexte que le traité de Versailles du 28 juin 1919 a prévu la réintégration de ceux qui ont perdu la nationalité française à la suite du traité franco-allemand du 10 mai 1871. Le décret du 11 janvier 1920, pris pour son application, a organisé la preuve de cette réintégration par l’inscription sur les registres de réintégration de plein droit. Depuis cette époque, le législateur a pris des mesures afin que cette situation, héritée de l’histoire, soit aussi peu gênante que possible pour les personnes originaires des trois départements concernés. Ainsi, l’article 27 de la loi no 73-42 du 9 janvier 1973 sur le droit de la nationalité dispose que les personnes réintégrées de plein droit en application du traité de Versailles doivent être considérées comme des Français d’origine pour l’application des dispositions du code civil qui exigent la possession de la nationalité française à titre de nationalité d’origine. Dans le même esprit, la loi no 61-1408 du 22 décembre 1961, modifiée par la loi no 71-499 du 29 juin 1971, facilite la preuve de la réintégration en les dispensant de la production d’un extrait du registre de réintégration de plein droit. Ce texte prévoit, en effet, que les personnes nées dans les départements concernés antérieurement au 11 novembre 1918, ainsi que leurs descendants, peuvent prouver leur nationalité française ou celle de leur auteur par la seule possession d’état de Français sur une génération. Par circulaire du 1er décembre 1993, ces dispositions ont été rappelées à l’ensemble des tribunaux d’instance, auxquels il a été fermement demandé de ne plus exiger, en règle générale, la production d’extraits des registres de réintégration. Près de quatre-vingts ans après le traité de Versailles, les personnes réintégrées ou les descendants de celles-ci devraient normalement pouvoir justifier d’une possession d’état de Français de nature à éviter le recours aux certificats de réintégration. Ni courriers ni recours hiérarchique des intéressés ne sont venus pour lors alerter la Chancellerie du problème causé par l’exigence de ces documents. Si cette difficulté devait se présenter, il conviendrait que ces personnes saisissent directement les services du ministre de la justice, particulièrement sensibilisés par cette question, afin que les instructions nécessaires soient adressées aux greffiers en chef des tribunaux d’instance concernés.